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Inquiétudes quant à la permanence de la dissuasion nucléaire au Royaume-Uni
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Inquiétudes quant à la permanence de la dissuasion nucléaire au Royaume-Uni

Par Pacôme Sébastien

 

Selon un article[1] du laboratoire d’idées londonien International Institute for Strategic Studies daté du 22 mai dernier, la composante océanique de la dissuasion nucléaire outre-Manche serait en difficulté. Le Royaume-Uni maintient en effet une dissuasion permanente – la Continuous At-Sea Deterrence (CASD) – avec quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) .

 

Tobias Ellwood, président de la commission spéciale pour la Défense de la Chambre des communes britannique (CASD), a indiqué dans une audition le 17 mars que deux des quatre SNLE ont été « hors de l’eau depuis plus d’une année »[2]. La CASD requiert au moins un submersible en patrouille (dont la sortie peut durer jusqu’à trois mois). Habituellement, un deuxième et un troisième sous-marin sont en entraînement en vue d’une patrouille prochaine, ou alors en maintenance à la base des sous-marins de Faslane en Ecosse. Le quatrième sous-marin est supposé être en phase de révision approfondie à la base de Devonport. Il semblerait que tant la maintenance que la révision approfondie aient subi des retards importants, entraînant une disponibilité moindre des SNLE. Par exemple, le HMS Vanguard est en révision approfondie depuis décembre 2015, pour une durée prévue de trois ans et demi ; la révision enregistre déjà un retard de plus d’un an et il n’est toujours pas certain que ce SNLE rejoigne la flotte cette année. Ces délais peuvent eux-mêmes décaler le calendrier de prise en charge des autres sous-marins. Des problèmes d’approvisionnement pour des composants clés auraient également retardé la révision des submersibles.

 

Au-delà des difficultés techniques, le problème de la durée de vie des SNLE de classe Vanguard se pose. La nouvelle génération de SNLE Dreadnought est attendue au début des années 2030. Ceci implique que les SNLE de classe Vanguard doivent servir au moins 37 ans, c’est-à-dire bien au-delà des 25 ans de durée de vie initialement prévus lors de sa conception. En outre, si le ministère de la Défense britannique insiste sur le fait que le programme Dreadnought est en bonne voie, le National Audit Office, organe parlementaire indépendant d’inspection des administrations et des politiques publiques, note dans un rapport de 2018 que des risques subsistent sur ce programme. Le coût estimé est de 31 milliards de livres sterling aujourd’hui, incluant 10 milliards imprévus.

 

Par ailleurs, des investissements sont destinés à moderniser les infrastructures relatives à l’accueil et au soutien de la flotte de sous-marins nucléaires. Un rapport publié le 13 mai par la commission des comptes publics de la Chambre des communes met en exergue des délais et des surcoûts significatifs pour ces opérations[3].

 

S’ajoutent désormais les défis inhérents à la pandémie du Covid-19. A court terme, la marine anglaise a introduit de nouvelles règles de précautions, dont une période d’isolation, afin de protéger la santé des équipages et de maintenir les patrouilles. A long terme, les chantiers et les opérations de maintenance sont susceptibles de subir encore davantage de retards, entravant le maintien de la dissuasion permanente.

 

 

[1]« UK Nuclear Challenges: Keeping ‘CASD’ Afloat ». IISS.https://www.iiss.org/blogs/military-balance/2020/05/uk-nuclear-challenges-casd(consulté le 25 mai 2020).

 

[2]« Parliamentlive.tv ».https://parliamentlive.tv/Event/Index/328b5bee-268a-410b-8a06-2b1349c91f53(consulté le 25 mai 2020).

 

[3]« Defence Nuclear Infrastructure – Committees – UK Parliament ». https://committees.parliament.uk/work/36/defence-nuclear-infrastructure/ (consulté le 25 mai 2020).

 

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