Du 6 au 8 décembre, la présidente de la République d’Estonie, Kersti Kaljulaid, s’est rendue à Dakar dans le cadre d’une visite officielle. Le numérique et la cybersécurité ont figuré au cœur des échanges bilatéraux avec le président sénégalais, Macky Sall.
Cette rencontre s’inscrit dans le droit fil de la démarche très volontariste engagée par gouvernement sénégalais en matière de cybersécurité, multipliant les initiatives visant à renforcer ses capacités de protection. Le 6 novembre dernier, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian et son homologue sénégalais, Sidiki Kaba, avaient inauguré l’École nationale en cybersécurité à vocation régionale (ENVR) de Dakar. Il s’agit d’un établissement de formation, fruit d’un partenariat franco-sénégalais sur les enjeux cyber. Cette nouvelle école a pour but d’augmenter les capacités locales des États ouest-africains à lutter contre le financement du terrorisme (LCFT) ou la radicalisation islamiste et à développer des moyens d’investigation numérique contre les cybercriminels. Elle vise aussi à créer une dynamique de coopération et d’harmonisation des politiques cyber entre États de la région.
La perspective d’une coopération renforcée avec l’Estonie sur la cybersécurité semble également très pertinente. En effet, l’Estonie est un pays pionnier en ce qui concerne la transformation digitale des services de l’État. Naturellement, cette numérisation des services publics a exposé le pays à de nombreuses vulnérabilités, particulièrement face aux cyberattaques lancés ou commanditées par son voisin russe. En 2007, l’Estonie avait été victime d’une attaque que d’aucuns ont qualifié de « premier acte de cyberguerre ». Des attaques massives par dénis de services distribués (DDoS), attribuées à la Russie par le gouvernement estonien, avaient paralysé l’activité d’opérateurs d’intérêt vital (ministères, banques, médias) pendant une quinzaine de jours. Face à ces cyber-menaces, l’Estonie s’est donc également imposée comme une nation pionnière en matière de cybersécurité. Depuis 2008, un Centre d’excellence en cyberdéfense, organisme multinational certifié par l’OTAN, s’est installé à Tallinn et mène des activités de recherche et de formation spécialisées dans la cyberdéfense. La France est devenue membre de ce centre en 2013.
Mais au-delà d’exporter son expertise en cybersécurité, la raison principale de la visite estonienne réside dans des considérations assez éloignées de la thématique. En effet, l’Estonie cherche surtout obtenir des soutiens sur le continent africain afin de figurer parmi les membres non-permanents du Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2020-2021. La présidente estonienne rentrait d’ailleurs tout juste d’une visite officielle au Bénin.
À noter que l’Estonie est également engagée militairement au Sahel. Depuis l’été 2018, un contingent de 50 soldats estoniens, basé à Gao au Mali, participe à l’opération Barkhane sous commandement français.