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Chine-Afrique : une première remise en cause de la « stratégie de la dette » ?
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Chine-Afrique : une première remise en cause de la « stratégie de la dette » ?

La Chine, contre toute attente, doit faire face à ses premiers échecs dans sa diplomatie africaine. Afin de créer une nouvelle “route de la soie” (ou “One belt, one road”) qui lui permettrait d’asseoir ses échanges à travers le monde, même en cas de tensions militaires sur ses zones côtières, et de prolonger l’effort du collier de perle, Xi Jinping a lancé depuis 2013 un chantier titanesque dont l’Afrique sait bénéficier. En effet, Pékin renforce peu à peu son rôle dans l’économie africaine et tisse un nouveau réseau d’affidés, comme en témoigne le dernier forum sino-africain, qui lui a permis d’entériner sa coopération dans les domaines commerciaux et sécuritaires.

 

Bien que les puissances occidentales perçoivent d’un mauvais œil cette incursion chinoise dans les affaires africaines (création de la base militaire de Djibouti qui a ravivé les tensions dans le Golfe d’Aden ; embargo onusien sur des livraisons d’armes chinoises à Bangui), la Chine a su se placer en allié de taille pour les pays africains par sa stratégie qu’elle qualifie volontiers de “gagnant-gagnant”. Il s’agit de proposer le financement de grands projets d’infrastructures censés répondre aux intérêts de la population locale tout en posant des jalons qui esquissent un nouveau couloir d’échanges propice au commerce chinois. On assiste néanmoins à une remise en cause des ambitions de Pékin, qui cette fois n’est pas liée à la politique occidentale mais bien aux réticences émises par les pays concernés.

 

Dans son analyse pour Le Monde[1], le chroniqueur Sébastien Le Belzic met en lumière l’étiolement du projet, par la rediscussion des grands contrats en Malaisie, au Pakistan, au Sri Lanka, au Népal, en Birmanie, et dorénavant en Afrique, avec le récent rejet en Sierra Leone d’un projet majeur. Il s’agissait de construire un aéroport à 60 km de Freetown, dont le montant s’élevait à 318 millions de dollars que la Chine devait gérer et entretenir. Le ministère des transports et de l’aviation a finalement mis un terme à ce projet, considérant qu’il ne servait pas les intérêts de la nation, et pouvait conduire à un endettement majeur. De fait, le FMI et la banque mondiale s’inquiètent de ces projets chinois qui peuvent se révéler économiquement non viables pour les pays concernés, et les plonger dans des dérives d’endettement par l’absence de gains de productivité et d’activités suffisantes : la diplomatie “gagnant-gagnant” cacherait donc en réalité une “stratégie de la dette” aux effets pervers. Ainsi, le Soudan du Sud doit utiliser son pétrole pour payer à la Chine les grands projets routiers qu’elle déploie. L’argent donné, comme le souligne Le Belzic, “revient dans la poche de Pékin via ses entreprises publiques” qui exploitent les matières premières ou disposent de conditions tarifaires attractives dans le domaine énergétique. La Chine détient à elle seule 20% des dettes publiques africaines, mais ce premier échec en Sierra Leone pourrait annoncer une prise de conscience de la part des pays africains, qui peuvent, en dernière instance, faire acte de souveraineté contre l’illusoire apparat du dragon chinois.

 

[1] La stratégie chinoise connait ses premiers échecs en Afrique, Sébastien le Belzic, Le Monde, édition du 15/10

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