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La civilianisation de l’armée turque après la tentative de coup d’État de juillet 2016
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Par Adrien Sémon, Henri du Périer et Pierre Alabrune,

 

 

« En Turquie, Dieu a d’abord créé les militaires, puis, réalisant son erreur, il créa le peuple turc »[1]

 

Ces propos de l’ancien président Süleyman Demirel font écho à la formule écrite par l’historien Albert Howe Lybyel au début du siècle dernier : « L’Empire ottoman était une armée avant d’être quoi que ce soit d’autre »[2]. De telles expressions attestent de la continuité du statut dominant des militaires au sein de l’appareil politique turc depuis l’Empire ottoman jusqu’à la Turquie moderne. Sur le plan sociologique, cette continuité transparaît dans la permanence de l’alliance des élites intellectuelles occidentalisées et des militaires qui remonte à la période des Tanzimat[3].

 

Le succès de la guerre d’indépendance (1919–1923) à l’issue de laquelle fut fondée la République de Turquie couronna de prestige les forces armées turques (TSK – Türk Silahlı Kuvvetleri) qui, unifiées par l’idéologie nationaliste, furent le pilier de la nouvelle entité politique. Si bien que, dans la culture politique turque, l’armée représente la stabilité tandis que le gouvernement est associé à un pouvoir politique fluctuant[4].

Dans un premier temps néanmoins, le rôle politique de l’institution militaire se trouve relégué au second plan par rapport au Parlement et au CHP (Cumhuriyet Halk Partisi) par Mustafa Kemal. Ce n’est qu’avec le passage au multipartisme en 1946, puis l’arrivée au pouvoir en 1950 du parti démocrate qui, sous l’égide d’Adnan Menderes, entame une politique rompant fortement avec les idéaux kémalistes et tente d’écarter les élites dirigeantes traditionnelles, que l’armée se positionne en tant qu’arbitre du jeu politique et gardienne des valeurs kémalistes, en particulier la laïcité et l’occidentalisation[5].

La deuxième moitié du XXe siècle a ainsi vu l’exécution de quatre coups d’État militaires (1960, 1971, 1980, 1997) dans le but avéré, à chaque fois, d’écarter une formation politique perçue comme une menace pour l’État. Il s’agissait non seulement de corriger les désordres introduits de façon à préserver les acquis du kémalisme, mais aussi de mettre à profit la situation de crise pour renforcer la position dominante de l’institution militaire dans l’appareil politique. Cela se fit en vertu de l’article 148 du Code pénal militaire de 1930, faisant de l’armée « l’avant-garde de la révolution » et lui donnant le droit d’intervenir en cas de menace contre la survie de l’État, et surtout d’une clause présente au sein des trois constitutions successives de la République de Turquie (1924, 1961, 1982) confiant à l’armée la protection de l’État contre les menaces externes et internes[6].

L’armée a de ce fait acquis des prérogatives qui ont abouti à la mise en place d’un système tutélaire où elle disposait d’un pouvoir de veto au sein du système de prise de décision politique, situation accentuée avec la constitution de 1982 et les lois passées durant la période de gouvernement militaire de 1980 à 1983. Notons à titre d’exemple qu’après 1982, le Conseil de Sécurité nationale (MGK) se trouve de facto entre les mains des militaires. Loin de constituer une simple instance de conseil, le MGK dispose d’une vaste administration ainsi que du droit d’intervenir directement auprès des ministres, forçant ainsi les partis au pouvoir à collaborer avec lui pour se maintenir. Il s’agissait d’un véritable gouvernement parallèle[7]. Ajoutons à cela le Conseil militaire suprême (YAŞ), créé en 1972, au sein duquel siégeait une majorité de militaires et qui était en charge des nominations et des promotions des officiers.

 

Fut perpétuée de la sorte l’alliance socio-politique entre l’élite intellectuelle occidentalisée kémaliste et les militaires, maintenant au pouvoir le même vivier duquel provient la bureaucratie civilo-militaire. Toutefois, l’exercice de coups d’État et les conséquences structurelles et politiques qui en résultèrent n’impliquent en rien que les militaires affichassent des positions partisanes bien établies. La dissolution du parti kémaliste CHP en 1980, considéré responsable de la situation insurrectionnelle, en constitue un exemple. La capacité de l’armée à mobiliser des groupements politiques minoritaires pour lesquels l’alliance avec les militaires constituait une ressource octroya à celle-là un rôle structurel tant dans la formation de coalitions politiques que dans la déstabilisation de certains gouvernements[8].

L’armée turque dispose en réalité d’une véritable autonomie qu’elle met à profit pour demeurer au-dessus des institutions politiques, moins pour arbitrer le jeu démocratique que pour favoriser ses alliances avec des groupes sociaux en cultivant ses réseaux dans la bureaucratie, l’institution judiciaire, les médias et les académies et par voie de conséquence poursuivre ses propres objectifs politiques[9].

 

Plusieurs changements interviennent à partir du tournant du XXIe siècle, à commencer par le mémorandum des militaires le 28 février 1997. Plutôt qu’un coup d’État en bonne et due forme – les soldats ne sont pas sortis de leurs casernes –, il s’agit d’une crise politique fomentée par les élites kémalistes et les militaires avec pour objectif final de renforcer les partis centristes[10]. Les élites kémalistes ont par ailleurs mobilisé l’ensemble des segments sécularistes au sein de la société face au Refah Partisi (RP) du Premier ministre Necmettin Erbakan. Ce dernier fut contraint à la démission le 18 juin 1997 et son parti islamiste fut interdit dès l’année suivante. Mais le climat ainsi engendré empoisonna la vie politique et eut in fine l’effet contraire à celui recherché. L’hostilité vis-à-vis des élites kémalistes laïcisantes augmenta, ce qui se manifesta avec l’arrivée au pouvoir en 2002 du Parti de la justice et du développement (Adalet ve Kalkınma Partisi, AKP), successeur du RP, en position hégémonique du fait de sa majorité parlementaire. Le gouvernement de l’AKP fait usage du processus d’intégration de la Turquie à l’Union européenne en cours depuis 1999 et des demandes exercées par celle-ci sur la réforme de l’appareil militaire turc pour démilitariser la vie politique. En particulier, il fait aboutir en juillet 2003 la réforme constitutionnelle lancée par Bülent Ecevit en 2001 et amende l’article 118 concernant le rôle du MGK. Celui-ci ne constitue désormais qu’une instance consultative. Par ailleurs, autorisation est donnée à la Cour des comptes de contrôler le budget des militaires et il n’y a plus de représentant de l’armée dans des organismes civils tels que le Conseil supérieur de l’enseignement et le Conseil supérieur de l’audiovisuel[11].

Les critiques de l’Union européenne pointent aussi du doigt le système de conscription et le maintien d’une armée de masse en Turquie. Partant elles incitent à la professionnalisation de l’armée, ceci dans le but d’induire un changement de récit du discours républicain nationaliste vers un discours plus libéral et par conséquent plus compatible avec l’intégration politique régionale[12]. De surcroît, le développement du paradigme libéral suggère plutôt l’entretien d’une armée professionnelle, bien moins coûteuse qu’une armée de conscription citoyenne, ce qui advient de manière progressive au cours de la décennie 2000, rapprochant dès lors l’armée turque du modèle occidental en vigueur depuis la fin de la Guerre froide.

 

Si ces réformes furent accueillies sans grands accrocs, la méfiance des généraux persiste quant à la ligne conservatrice de l’AKP. Les premiers conflits avec les militaires arrivent avec l’élection présidentielle de 2007 lorsque l’état-major avertit le gouvernement de certains manquements et tenta de s’opposer à la candidature d’Abdullah Gül. Les militaires procédèrent de la même manière qu’en 1997 en publiant un mémorandum avec le soutien apparent de l’institution judiciaire[13] dans le but de créer une situation de crise politique sans pour autant mettre en œuvre une intervention militaire directe dont l’état-major craignait qu’elle n’engendra de l’hostilité à l’égard de l’armée. Le climat politique devint à nouveau délétère, mais les partis d’opposition ne parvinrent pas, malgré leur succès à faire annuler le scrutin du 27 avril, à empêcher Abdullah Gül d’accéder à la présidence au mois de mai suivant[14].

Dès l’année suivante, concomitamment à une tentative infructueuse du procureur général, saisi par les milieux laïcs, de faire interdire l’AKP, le parti au pouvoir, fort de sa position hégémonique et des relais dont il dispose dans l’institution judiciaire par le biais de son alliance avec la confrérie de Fethullah Gülen, ouvre les premiers procès contre les militaires. Les procès Ergenekon et Balyoz conduisent entre 2007 et 2010 à l’arrestation et à l’inculpation de plusieurs centaines d’officiers et se couplent d’une action politique énergique pour démettre l’armée de ses derniers leviers au sein du pouvoir civil. En 2010 aboutit une réforme constitutionnelle qui ôte à l’armée son rôle de gardienne de la République de Turquie. La démission l’année suivante du chef d’état-major après le refus du Premier ministre Erdogan de promouvoir certains officiers consacre une victoire symbolique pour ce dernier. Cela achève la démilitarisation du système politique turc et entame la civilianisation de l’armée – l’ouverture des forces armées à la présence voire à l’ingérence de civils – en reconnaissant au Premier ministre un pouvoir réel dans la nomination des officiers[15].

 

Le coup d’État manqué de 2016 a joué un rôle de catalyseur dans la mise au pas de l’armée par le pouvoir civil. Il n’est dès lors plus question de démilitariser la vie politique, ou d’éloigner le pouvoir militaire du gouvernement mais d’en investir la structure pour éliminer toute influence güleniste et s’assurer une forme d’alignement au pouvoir civil. Depuis 2016, on constate des changements importants dans la culture militaire : la marche funèbre de Chopin, qui était l’hymne des obsèques militaires depuis 1932, a été remplacée par le takbir, le foulard islamique a été autorisé pour les femmes en 2017, la prière au déjeuner qui utilisait le terme turc “Tanrı” pour dire Dieu a été remplacé par “Allah”[16], et on voit même une unité militaire crier Allahüekber en 2018 lors de la campagne pour prendre Afrin[17]. À la multiplication de signes et référentiels religieux dans l’armée, on peut également ajouter l’incorporation de nombreux éléments civils dans sa structure.

Les nombreuses purges et les réformes menées à tour de bras depuis maintenant cinq années ont généré d’importantes transformations de l’appareil militaire et de sa capacité à entreprendre une action politique de manière autonome. Si le processus de civilianisation ne fait guère de doute, la nature de celle-ci en revanche interroge. Pour reprendre le questionnement de Metin Gürcan et Megan Gisclon, s’agit-il d’une démocratisation du système sécuritaire ou bien d’une sécuritisation du système démocratique ?[18] Pour le formuler autrement, la civilianisation de l’institution militaire turque va-t-elle dans le sens d’une démocratisation ou au contraire d’une reprise en main autoritaire de l’État ? Signe-t-elle la fin du rôle politique exercé par les militaires ? Par ailleurs, il convient d’interroger la réalité et l’étendue des changements sociologiques et culturels au sein de l’armée induits par le processus de civilianisation.

 

Un premier élément de réponse apparaît dans les profonds changements structurels qui ont impacté l’institution militaires aux lendemains du coup d’État manqué de 2016. Depuis les années 1980, l’armée s’organisait autour de cinq branches : l’Armée de Terre, la Marine, l’Armée de l’Air, la Gendarmerie et la garde côtière. Toutes étaient sous l’autorité directe du chef d’état-major des armées qui lui-même surplombait le ministre de la Défense alors cantonné à un simple rôle administratif. Les récentes réformes ont démantelé cette structure en conférant au ministère de l’Intérieur l’autorité pleine et entière sur la Gendarmerie et la garde côtière tandis que les chefs d’état-major des trois branches principales furent placés sous l’autorité directe du ministre de la Défense et non du chef d’état-major des armées[19]. L’état-major, qui auparavant dominait le ministère de la Défense, est désormais sous son contrôle étroit. Par ailleurs, le réseau médical militaire fut supprimé et les juridictions militaires abolies en temps de paix. La civilianisation de l’armée se perçoit également dans la qualité du personnel engagé, à commencer par le ministère de la Défense qui n’est plus exclusivement composé de militaires. Il en va de même au sein de la nouvelle Université de la Défense nationale (MSÜ) qui remplace les anciennes académies militaires[20].

La dislocation ainsi actée brise l’autonomie de l’institution militaire et soumet ses actions aux décisions du pouvoir exécutif sans possibilité pour les différentes branches de se coordonner en-dehors d’un contrôle gouvernemental. Une dernière mesure, le transfert des garnisons en dehors des villes[21], symbolise l’esprit de l’ensemble de cette réorganisation : cantonner l’armée à son rôle premier qui est de faire la guerre.

 

Néanmoins, cette mise à l’écart ne conduit pas à la démocratisation du système politique turc. Pour cela il aurait fallu instaurer un contrôle parlementaire sur les actions menées par l’armée de même que sur les fonds. Or, si la Cour des comptes à bien accès à ces derniers, il n’est aucune commission parlementaire dédiée à leur examen. La civilianisation de l’institution militaire ne vient donc pas renforcer le pouvoir législatif sur ces questions, mais seulement le pouvoir exécutif qui par la même occasion acquiert des leviers d’indépendance supplémentaires par rapport au pouvoir législatif. De la sorte, ce mécanisme accompagne la présidentialisation du régime orchestrée par Recep Tayyip Erdoğan et actée depuis 2018. À ce titre, force est de constater que le président de la République s’est accaparé par des décrets-lois le titre de chef des armées en violation de ce que prévoit la constitution. De plus, d’autres décrets-lois ont mis en place un processus par lequel le ministre de la Défense et le président peuvent donner des ordres directement aux chefs d’état-major des trois armées sans que ceux-ci ne soient en capacité de les contester[22]. En raison de la soumission du ministre de Défense au président de la République, chef du pouvoir exécutif, ce dernier détient la réalité du pouvoir sur l’appareil militaire.

 

La conscription et le recrutement des officiers constituent un autre pan d’analyse permettant de répondre à nos questions. La réforme du service militaire en 2019 qui en réduit la durée de douze à six mois accentue la professionnalisation de l’armée[23]. Elle a débuté dans les années 2000, dans un contexte où les instances financières supranationales acquièrent une plus grande influence sur l’économie turque, pour la bonne intégration du pays au système international libéral. Cette démilitarisation du système politique détache progressivement de l’armée les élites qui créent des réseaux de pouvoir politique et économique en dehors des sphères militaires. Ce mouvement de fond est accéléré avec l’émergence à la même période d’une nouvelle élite anatolienne pieuse et par conséquent éloignée des valeurs kémalistes prônées par l’armée. Dès lors, la réforme du recrutement des officiers avec la création de la MSÜ et l’ouverture du concours aux étudiants provenant des lycées İmam Hatip[24] pourraient être interprétées comme résultant de la volonté politique de l’AKP de détacher encore plus l’élite traditionnelle kémaliste de l’institution militaire pour rapprocher cette dernière de la nouvelle élite anatolienne.

Plusieurs éléments vont dans ce sens et témoignent d’un début de transformation de la culture organisationnelle de l’armée. Notons par exemple l’introduction d’éléments de piété et de religiosité islamique dans le quotidien des militaires. Par ailleurs, l’accroissement des opérations extérieures de l’armée au sein des États frontaliers de la Turquie favorise un changement de nature du prestige associé à l’armée. Celui est désormais moins lié à la défense du territoire national qu’à l’affirmation de la Turquie en tant puissance militaire d’envergure régionale au sein de territoires qui firent autrefois partie de l’Empire ottoman. La mise en avant de l’histoire ottomane – notons à ce titre que le recteur de la MSÜ est un historien spécialiste de celle-ci – semble procéder de ce même changement de récit national. On pourrait y voir une tentative pour faire converger la culture organisationnelle de l’armée avec les idéaux conservateurs promus par l’AKP.

Au demeurant, on ne saurait surinterpréter l’étendue des changements culturels qui, par nature, sont les plus longs à mettre en place et qui, ici, apparaissent en réalité limités et fragiles. Remarquons que la figure d’Atatürk et son héritage demeurent toujours très respectés, tant dans l’armée que dans la société civile. Le site internet de la MSÜ expose ainsi une biographie très standard de Mustafa Kemal Atatürk sans qu’on puisse distinguer une tentative de changement de récit. Il vaut donc mieux considérer que la présence simultanée au sein de l’armée de ce récit kémaliste et de nouvelles normes culturelles limitées témoignent pour le moment d’une alliance fragile entre les officiers kémalistes, réintégrés pour compenser la purge des officiers gülenistes, et le gouvernement. Ce compromis doit permettre d’assurer la civilianisation de l’appareil militaire ainsi que le recrutement d’une génération plus fidèle au gouvernement et à terme plus perméable aux normes culturelles conservatrices pour l’instant superficielles au sein de l’armée.

 

L’ensemble des aspects ci-dessus développés nous conduit enfin à proposer l’hypothèse suivante. Les changements structurels, de même que la compétition de normes culturelles au sein de l’armée introduisent un risque d’apparition de facteurs politiques dans la nomination des officiers et par voie de conséquences de factions politiques au sein de l’armée. La nomination des officiers, aujourd’hui réalisée au sein du YAŞ contrôlé par le gouvernement, pourrait non seulement dépendre de solidarités politiques au sein du ministère de la Défense, mais aussi au sein des partis politiques qui alterneraient au pouvoir.

D’autre part, la nouvelle structure de l’institution militaire fonctionne à ce jour du fait de la personnalité très respectée de l’actuel ministre de la Défense, Hulusi Akar, ancien chef d’état-major. Cela dénote tout de même la nécessité de maintenir un militaire fidèle au parti au pouvoir à la tête du ministère de la Défense. Qu’un civil prenne cette place et l’équation politique pourrait devenir tout autre et générer d’éventuels dysfonctionnements et rivalités entre les différentes armées pour l’obtention de prérogatives et de positions de pouvoir. Il est très incertain en effet qu’un ministre de la Défense issu de la société civile parvienne à imposer son autorité sur les hauts-gradés de l’armée qui possèdent une longue tradition d’autonomie vis-à-vis de la sphère politique civile[25].

 

Ajoutons pour finir que l’organisation de l’armée en groupe politique autonome semble une caractéristique historique de la culture politique turque. Plusieurs purges au sein de l’armée ont eu lieu lors de la longue histoire de l’Empire ottoman. Chacune favorise en réalité l’émergence d’une nouvelle élite militaire, mais aussi bureaucratique, à la tête de l’État. La plus célèbre d’entre elles est sans conteste le massacre des janissaires en 1826. Par la suite, une élite militaire occidentalisée émergea ; elle parvint à son tour à conquérir une forme d’autonomie institutionnelle. Cette armée fut l’embryon d’État autour duquel se forma d’abord le mouvement Jeunes Turcs puis la République de Turquie.

La purge qui suivit le coup d’État manqué de 2016 marque peut-être moins la fin du rôle politique de l’armée qu’un tournant favorisant le passage de témoin d’une élite traditionnelle kémaliste à une élite anatolienne au sein des différentes sphères de pouvoir, armée comprise.

 

La véritable inconnue dans la poursuite de ce processus réside dans les résultats de l’élection présidentielle turque prévue pour 2023. Une défaite de l’AKP et du président Erdoğan remettrait en question une partie des transformations en cours. Les changements structurels devraient persister, mais rien n’est moins sûr en ce qui concerne les changements sociologiques qui demeurent les plus fragiles et superficiels.

 

 

[1] L. Haugom, « The Turkish Armed Forces and Civil-military Relations in Turkey after the 15 July 2016 Coup Attempt », Scandinavian Journal of Military Studies 2, 2019, p. 3.

[2] A. Lybyer, The Government of the Ottoman Empire in the Age of Suleiman the Magnificent, Cambridge MA, Harvard University Press 1913, p. 90

[3] H. Ete, « Reframing the July 15 Coup Attempt: A Political and Sociological Examination » Bilig 87, 2018, p. 181.

[4] L. Haugom, « The Turkish Armed Forces and Civil-military Relations in Turkey after the 15 July 2016 Coup Attempt », Scandinavian Journal of Military Studies 2, 2019, p. 2.

[5] L. Ünsaldi, « Du rôle politique de l’armée en Turquie », Revue Tiers Monde 194, 2008, pp. 261-262.

[6] G. Dorronsoro, B. Gourisse, « L’armée turque en politique. Autonomie institutionnelle, formation de coalitions sociales et production des crises », Revue française de science politique 65, 2015, p. 609.

[7] Ibid., p. 626.

[8] Ibid. p. 627.

[9] L. Haugom, « The Turkish Armed Forces and Civil-military Relations in Turkey after the 15 July 2016 Coup Attempt », Scandinavian Journal of Military Studies 2, 2019, p. 3.

[10] H. Ete, « Reframing the July 15 Coup Attempt: A Political and Sociological Examination » Bilig 87, 2018, p. 185.

[11] L. Ünsaldi, « Du rôle politique de l’armée en Turquie », Revue Tiers Monde 194, 2008, p. 263.

[12] S. Demir, A. Eminoglu, « Analysis of turkish military system: conscription, mass/Professional army and EU membership », dans E. Dogan, G. Gönüllü, Contemporary Issues in International Relations, Politics and Law, IJOPEC, London, 2018, pp. 8-17.

[13] H. Ete, « Reframing the July 15 Coup Attempt: A Political and Sociological Examination » Bilig 87, 2018, p. 186.

[14] G. Dorronsoro, B. Gourisse, « L’armée turque en politique. Autonomie institutionnelle, formation de coalitions sociales et production des crises », Revue française de science politique 65, 2015, p. 626.

[15] L. Haugom, « The Turkish Armed Forces and Civil-military Relations in Turkey after the 15 July 2016 Coup Attempt », Scandinavian Journal of Military Studies 2, 2019, p. 5.

[16] S. Kaya, « Islamisme rampant en Turquie : l’école et l’armée en point de mire », Orient hebdo, RFI, 2019, https://www.rfi.fr/fr/emission/20190929-turquie-islamisme-rampant-erdogan-ecole-armee-sumbul-kaya-nicolas-cheviron.

[17] « First Time Turkey army sayed Allah ho Akbar », Youtube, 30/01/18, https://www.youtube.com/watch?v=CZVvthoDPi8

[18] M. Gürcan. M. Gisclon, « Turkey’s security sector after July 15 : Democratizing Security or Securitzing the State ? », Turkish Policy Quarterly 15, 2017, pp. 67-85.

[19] E., Boz-Acquin, « La Réforme des Institutions Militaires en Turquie », IRIS, septembre 2018.

[20] Ibid.

[21] S. J. Flanagan, et al., Turkey’s Nationalist Course : Implications for the U.S.-Turkish Strategic Partnership and the U.S. Army, RAND Corporation, 2020, p34-35.

[22] E., Boz-Acquin, « La Réforme des Institutions Militaires en Turquie », IRIS, septembre 2018.

[23] Ibid.

[24] S. Kaya, « Islamisme rampant en Turquie : l’école et l’armée en point de mire », Orient hebdo, RFI, 2019, https://www.rfi.fr/fr/emission/20190929-turquie-islamisme-rampant-erdogan-ecole-armee-sumbul-kaya-nicolas-cheviron.

[25] Ibid.

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