Alors que le Président de la République Emmanuel Macron avait annoncé, lors du sommet de Pau en janvier dernier, le renforcement de l’opération Barkhane avec l’envoi supplémentaire de 220 soldats, 600 soldats seront déployés dans la zone sahélienne en ce début d’année.
Dans un communiquée de la Ministre des armées, Florence Parly a précisé que ces troupes seront déployées principalement dans la zone dite des trois frontières, entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. La région a été, l’année passée, le théâtre d’une intensification des attaques menées par les groupes armées terroristes, ciblant principalement les forces armées régulières mais aussi les populations civiles.
Cette intensification et la létalité croissante des attaques dans la région peut s’expliquer par les diverses recompositions qui s’y sont opérées depuis ces deux dernières années. On peut évoquer tout d’abord le rapprochement des katibas sahéliennes, celles d’Al Mourabitoune, de Ansaroul Islam, de la Katiba Macina, d’Ansar Dine et du MUJAO au sein du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) en réaction au développement de l’Etat Islamique dans le Grand Sahara (EIGS) depuis 2015.
En dépit de leurs divergences, ces deux groupes sont suspectés de s’apporter une aide mutuelle, principalement dans la zone frontalière de Ménaka-Tillabéri, entre le Mali et le Niger, mais aussi dans l’Est du Burkina Faso, principalement dans la province du Soum. Ces recompositions, mais aussi la dynamique de ces groupes qui se déploient en direction du sud dans la bande sahélo-saharienne n’est pas sans liens avec les succès de la force Barkhane, mais aussi le regroupement des pays sahéliens depuis 2017 dans la force conjointe du G5 Sahel.
Ces interventions militaires ont toutefois très largement fragilisées le tissu social de la région, notamment par l’emploi de groupes armées non étatiques, notamment les Touaregs Imghads (Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés – GATIA) et Daoussahaks (Mouvement pour le salut de l’azawad – MSA). A ces groupes, s’ajoutent les différentes milices d’auto-défenses des communautés Dogons, Peuls, Bambaras et Mossis. Les tensions inter-communautaires accentuées par les exactions et règlements de comptes entre ces différentes communautés constituent ainsi un terreau favorable pour les groupes djihadistes, qui menacent désormais les pays frontaliers du Burkina Faso et du Niger, notamment le Ghana, le Togo et le Bénin.
Si le renforcement de l’opération Barkhane par l’envoi de 600 soldats supplémentaires témoigne de la volonté française de poursuivre ses efforts contre les groupes djihadistes, en dépit des critiques portées dans certains espaces africains, l’emphase ne doit pas seulement être portée sur la dimension militaire, mais aussi et surtout sur une recherche de solutions politiques, sociales et économiques aux problèmes que connaît la région, et où le djihadisme est plus symptôme que cause.