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L’Irak en ébullition entre manifestations et répression
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Depuis le 1er octobre, l’Irak est le théâtre de nombreuses manifestations sévèrement réprimées. Il n’est pas inhabituel que des manifestations y aient lieu. En effet, voilà près de 16 ans que le pays connaît une instabilité chronique, renforcée il y a quelques années par l’invasion éclair de Daesh. Alors que la chute du groupe djihadiste aurait dû marquer le départ d’un renouveau, force est de constater que peu de choses ont évoluées : les protestations de la rue en témoignent.

 

Les motivations de cette vague de manifestations sont multiples : chômage, corruption, déliquescence des services publics (pénuries d’eau et d’électricité récurrentes), misère galopante ou encore ingérences étrangères – notamment iranienne, il semblerait, comme en atteste les protestations à propos du transfert du chef du contre-terrorisme, Abdelwahab Al-Saadi, opposant aux proxis iraniens, autant de facteurs qui s’entremêlent pour former un cocktail explosif, l’un des plus virulents depuis ceux du Printemps arabe de l’année 2011. Le mécontentement est général et l’explosion ne s’est donc pas faite attendre. De manière spontanée, puis relayées par les réseaux sociaux, sans instrumentalisation religieuse ou politique, tout du moins c’est ce qui semble transparaître pour l’instant, les premières manifestations ont débuté mardi 1er octobre à Bagdad et dans quelques villes, majoritairement chiites, dans l’est et le sud du pays. La répression n’a pas tardé à sévir et, simultanément à l’expansion des protestations à d’autres villes et provinces, les moyens déployés pour contrer les milliers de manifestants se sont renforcés : les lacrymogènes et canons à eau ont rapidement cédé la place aux tirs de semonce puis à des tirs létaux. Dans ces confrontations, une centaine de manifestants ainsi qu’une demi-dizaine de policiers ont été tués tandis que des milliers de blessés sont à déplorer. Parallèlement, le gouvernement a ordonné la coupure du réseau internet sur la majeure partie du territoire et a instauré un couvre-feu dans plusieurs villes entre jeudi et samedi pour tenter de porter un coup à la mobilisation des protestataires mais cela sans grand succès.

 

Que laissent alors présager ces manifestations ? Depuis mardi de nombreux bâtiments gouvernementaux ou étrangers ont été pris pour cible. La place Tahrir à Bagdad proche de la Green Zone – secteur où se concentrent des institutions politiques nationales et des édifices étrangers – est l’une des zones que souhaiteraient atteindre les protestataires bien que l’action des forces de sécurité les en empêche encore. L’objectif n’en demeure pas moins clair : la chute du régime.

 

Par ailleurs, une récupération politique du mouvement n’est pas à négliger, quoique peu probable dans les conditions actuelles des partis ayant signalé leur soutien contre le gouvernement actuel. Le pays pourrait aussi devenir le terrain d’affrontement privilégié d’acteurs régionaux afin de faire basculer son alignement, qu’il s’agisse de l’Iran, de l’Arabie Saoudite ou encore des restes de l’organisation Etat Islamique, cette dernière pouvant tirer profit de la déstabilisation croissante pour entreprendre un retour offensif. L’action de combattants inconnus contre des chaînes de télévision privées ce samedi 5 octobre vient de surcroît alimenter les craintes de la poursuite de buts propres, ici d’un acteur encore indéfini.

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