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STRATCOM veut armer les sous-marins de la Navy de missiles nucléaires dotés d’ogives à faible puissance
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STRATCOM veut armer les sous-marins de la Navy de missiles nucléaires dotés d’ogives à faible puissance

Le STRATCOM, le commandement américain en charge du contrôle militaire des armes nucléaires, a pris la décision d’armer les SNLE que met à sa disposition la Navy de missiles nucléaires dotés de têtes nucléaires à faible puissance. Le développement de ces armes est en accord avec le traité New START signé en 2010 et entré en vigueur en 2011, traité ratifié par les Etats-Unis et la Russie pour la réduction des armes stratégiques nucléaires. Le commandant de STRATCOM, le général John Hyten a déclaré que les armes nucléaires de puissance élevée embarquées à bord des SNLE seraient remplacées par des armes de plus faible puissance. Si le nombre d’armes devrait demeurer inchangé, il ajoute que « nous pensons que des armes de plus faible puissance nous donnent une meilleure chance de dissuader nos adversaires ». Cette décision s’inscrit à la suite d’inquiétudes exprimées par des chefs du Pentagone et des membres du Congrès qui s’alarment des avancées de la Chine et de la Russie dans le développement des armes nucléaires de faible puissance, ces progrès technologiques étant vus comme une tentative de la part de ces Etats de prendre l’avantage en matière nucléaire sur les Etats-Unis et leurs alliés protégés par le parapluie nucléaire américain.

 

Le développement d’armements nucléaires tactiques est avéré dès le début de l’aventure atomique. La possibilité de miniaturisation et la nécessité de développer une arme nucléaire à la portée du champ de bataille font émerger ces armes dans les arsenaux, emportant une charge nucléaire de quelques kT. Se développe parallèlement de nouveaux vecteurs, et l’on ne peut que penser, dans le cas français, au missile Pluton monté sur un châssis d’AMX 30 capable de porter une charge d’une dizaine de kT à 100 km. Mais il n’y a de « tactique » que la portée puisqu’une telle charge, même sur un objectif purement militaire, entrainerait inévitablement le conflit dans une autre dimension. Certains penseurs stratégiques (à l’instar de Lucien Poirier, Des Stratégies Nucléaires, 1977) ont même estimé que le développement du nucléaire tactique constitutait la réelle révolution atomique puisque, désormais, le nucléaire intégrait le champ de bataille, les plans et les arsenaux des généraux, créant un continuum entre guerre nucléaire et guerre conventionnelle, qui semblaient hermétiquement séparées depuis les années 1950.

 

C’est dans cette logique que le général Hyten défend l’arsenal tactique : en abaissant le seuil nucléaire, il rendrait plus crédible la dissuasion américaine. La stratégie américaine semblerait dès lors renouer avec le concept « d’escalade » développé dans les années 1960 par Herman Kahn (On Escalation, 1965), comme on le retrouve dans ces propos de Michael Turner (Républicain – Ohio), membres de la sous-commission : « Il y a [avec le développement des armes tactiques] une préoccupation ne pas riposter, parce que si toutes nos armes ont une puissance importante, alors nous ne pourrions les utiliser sans que nous ne soyons pris dans l’escalade à leur escalade ». Traduit dans les termes des années soixante, il s’agit de maîtriser pleinement chacun des degrés de l’escalade (diplomatique, conventionnel, tactique, stratégique) pour enrayer ce mécanisme et simultanément être pleinement dissuasif dans toutes les dimensions de la guerre.

 

Cependant, cette doctrine ne fait pas l’unanimité au sein de la Chambre des représentants, certains ayant porté en septembre un projet pour interdire le développement d’armements nucléaires tactiques. L’un des risques dénoncés est celui d’une relance de la course aux armements, dès lors que l’équilibre de la terreur ne serait plus assuré entre puissances nucléaires.

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