Par Lucie Haigneré
1. Mark Esper, ancien Secrétaire à l’US Army, confirmé par le Sénat comme nouveau Secrétaire à la Défense (90-8)
Mardi 23 juillet, un vote écrasant du Sénat américain, par 90 voix contre 8, a confirmé Mark Esper au poste de secrétaire à la Défense après six mois d’intérim de Patrick Shanahan. Celui-ci avait remplacé au pied levé James Mattis après la démission de ce dernier en décembre 2018. Cette nomination apparaît comme salutaire, car Shanahan n’était en effet pas titulaire mais occupait le poste de chef du Pentagone à titre intérimaire ; en outre, il était grand temps qu’un homme disposant de la confiance du président Donald Trump et du Sénat soit nommé de façon pérenne au poste clé de chef de la défense américaine. Le sénateur républicain du Kentucky Mitch McConnell, chef de la majorité au Sénat, a ainsi déclaré, à propos de la nomination et de la confirmation de Mark Esper, que « son engagement au service des membres de nos forces armées est plus que manifeste. Et que le besoin d’un secrétaire à la Défense titulaire confirmé par le Sénat va au-delà de l’urgence. »
Même si plusieurs élus démocrates ont voté contre la nomination de Mark Esper à la tête du Pentagone, notamment Elizabeth Warren, candidate démocrate à la présidentielle de 2020, qui s’inquiète du risque de conflit d’intérêt en raison des liens entretenus par le nominé avec l’industrie de l’armement – Mark Esper a travaillé pour le géant de l’industrie de défense Raytheon -, le résultat sans appel du vote semble néanmoins attester que cet ancien militaire a su emporter la confiance des sénateurs, tant démocrates que républicains. A cet égard, James Inhofe, sénateur républicain de l’Oklahoma et président du Senate Armed Services Committee (Comité sénatorial des forces armées) a déclaré qu’Esper était « évidemment la bonne personne », et qu’il était rare que Républicains et Démocrates atteignent un véritable consensus sur la nomination d’un homme à un poste clé du gouvernement.
Diplômé de l’académie militaire de West Point, mais également d’Harvard (Master in Public administration) et de George Washington (Doctorat), Mark Esper bénéficie d’une expérience avérée des affaires militaires. Il a ainsi participé à la guerre du Golfe au sein de la prestigieuse 101e division aéroportée, (les fameux « Aigles hurlants »). Après 10 ans de service, il rejoint la vie civile où il travaille pour le think-tank conservateur Heritage Foundation puis sert à différents postes de conseiller de haut niveau en matière de sécurité et de défense, notamment au Congrès et dans l’administration Bush, avant d’occuper différentes fonctions à haute responsabilité dans l’industrie aéronautique et de défense. Son dernier poste fut celui de vice-président en charge des relations avec le gouvernement pour le géant de l’armement Raytheon. En novembre 2017, il a été nommé par le président Donald Trump et confirmé par le Sénat comme Secrétaire à l’Army.
La confirmation de Mark Esper au poste de secrétaire à la Défense a été saluée par les législateurs américains, qui rappellent aussi au président Trump que de nombreux postes au sein du Pentagone demeurent vacants – on attend par exemple la nomination d’un nouveau secrétaire de l’Air Force afin de permettre une grande plus stabilité du ministère et une concordance accrue entre les décisions. Il s’agit d’ailleurs de l’une des premières préoccupations évoquées par Esper, qui entend être sûr d’avoir « un contrôle civil des affaires militaires » aussi clair qu’efficace. Mark Esper s’est exprimé sur la question du budget de la Défense, indiquant qu’il était satisfait du texte élaboré pour l’année fiscale 2020 prévoyant d’attribuer 738 milliards de dollars aux forces américaines.
L’ancien militaire va prendre ses fonctions dans un climat de tension pour les Etats-Unis, notamment au Moyen-Orient, où Téhéran et Washington n’ont eu de cesse de se provoquer ces dernières semaines, sans compter les nombreux dossiers majeurs, parmi lesquels : le retrait de Syrie, les perspectives pour le théâtre afghan, la Corée du Nord, le retour à la préparation du combat de haute intensité dans un contexte de montée en puissance chinoise et de recrudescence de l’activité militaire russe. En outre, Mark Esper devra gérer la question du mur à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, objet de nombreuses polémiques impliquant le Pentagone, puisque Donald Trump a obtenu sa participation financière aux travaux d’infrastructure à hauteur de 2,5Mds$, ce que la Cour Suprême a autorisé par une décision rendue vendredi 26, une mesure controversée qui apparaît pour certains responsables de la défense américaine comme un gaspillage de ressources pouvant être dépensées à meilleur escient, en particulier pour répondre à des besoins opérationnels considérés comme prioritaires.
2. Le général Mark Milley, ancien Chef d’Etat-Major de l’US Army, confirmé par le Sénat comme nouveau Chief of the Joint Chiefs of Staff
Le Sénat a voté de façon quasi unanime, par 89 voix contre 1, en faveur de la nomination du général Mark Milley au poste de Chief of the Joint Chiefs of Staff – CJCS – (chef d’état-major des armées américaines). Ce dernier, qui servait jusqu’ici comme Chief of staff of the Army (chef d’état-major de l’armée de terre), succède donc au général Joseph Dunford qui occupait ce poste depuis 2015. Il prendra ses fonctions courant septembre.
Mark Milley a eu une prestigieuse carrière dans l’US Army, servant notamment dans la 82ème division aéroportée, au sein des forces spéciales (5ème groupe) et dans plusieurs divisions d’infanterie. Il a été déployé sur plusieurs théâtres d’opérations extérieures, en particulier l’Irak, où il a servi alors qu’il était « béret vert », mais également à Panama, en Bosnie-Herzégovine et en Afghanistan. Le général Milley a ensuite occupé des postes de commandement de niveau croissant (2ème Brigade Combat Team ; 101ème division d’armée ; 10ème division de montagne ; 3ème Corps d’Armée), jusqu’à être nommé à la tête de l’ United States Army Forces Command avant de devenir Chief of Staff de l’US Army. De surcroît, Milley est diplômé de deux prestigieuses universités américaines, Princeton où il a suivi des cours de sciences politiques, et Columbia en relations internationales. Il allie donc expérience militaire dans un conflit in situ et réflexion épistémologique sur la gestion des conflits armés.
Il aura pour rôle de coordonner l’ensemble des actions entreprises par les forces américaines dans le monde, et il sera simultanément l’un des principaux conseillers du président Donald Trump dans les affaires militaires.