La ministre des Armées Florence Parly était en déplacement à Singapour ce weekend à l’occasion du Shangri La Dialogue, une conférence internationale sur les questions de défense en Asie qui se tient chaque année depuis 2002 à l’initiative de l’International Institute for Strategic Studies (IISS). Son discours a été l’occasion d’insister sur le rôle de la France en Asie, qui dispose dans la région d’une ZEE de 9 millions de km2, d’1,6 million de ressortissants dans les territoires et départements d’outre-mer et de plus de 7 000 militaires, mais qui doit cependant encore s’affirmer auprès des autres acteurs de la zone. Après avoir dénoncé la montée continue des tensions, la ministre a dégagé plusieurs enjeux primordiaux pour Paris dans le cadre de la construction d’une architecture stable de sécurité en indopacifique : le nécessaire maintien du multilatéralisme -notamment sur le dossier nord-coréen- et la mobilisation des forces armées françaises face aux catastrophes climatiques, mais surtout la préservation d’un accès libre aux lignes de communications maritimes. Si la Chine n’a pas été nommée, le message est clair : la France compte maintenir sa présence en mer de Chine méridionale sans accepter la stratégie du fait accompli sur laquelle s’appuient les revendications territoriales et maritimes de Pékin. Pour faire porter son message, la ministre des Armées a pu compter sur la présence à Singapour du porte-avions Charles de Gaulle et de son escorte. Le groupe aéronaval vient de conclure dans le golfe du Bengale une série d’exercices, qui a pris le nom de l’explorateur français du XVIIIème siècle « La Pérouse », afin de renforcer l’interopérabilité avec les marines japonaise, américaine et australienne.
De son côté, le général Wei Fenghe, ministre de la Défense chinois, a dénoncé les pressions américaines en réaffirmant la volonté de la Chine d’y résister. Ont ainsi été successivement évoquées les tensions commerciales, la Chine étant prête à « se battre jusqu’à la fin » alors que des droits de douanes majorés de 25% sur plus de 2000 milliards de dollars d’importations chinoises sont entrés en vigueur samedi aux Etats-Unis, les tensions en mer de Chine du Sud et la question taiwanaise. Taïwan étant, selon la vision officielle de Pékin, une province chinoise, le Taiwan Relation Act de 1979 qui mentionne l’implication américaine en cas de réunification par la force est dénoncé comme étant une ingérence intolérable dans les affaires intérieures de la Chine. Son discours est intervenu après que Patrick Shanahan, le secrétaire à la Défense des Etats-Unis, a appelé la Chine à intégrer un « ordre international basé sur le droit » pour gagner la confiance de la communauté internationale, le ministre chinois ayant répliqué en maintenant la rhétorique chinoise d’une ascension pacifique contrainte à la militarisation par la présence américaine dans son environnement proche.