Selon le New York Times, afin d’appuyer les efforts de négociation conduits par l’envoyé spécial de Washington Zalmay Khalilzad, le Pentagone a élaboré un plan de retrait des forces américaines du théâtre afghan. Ce plan, il convient de le souligner, a été partagé avec les partenaires européens de Washington présents en Afghanistan dans le cadre de l’opération Otan Resolute Support. Selon ce plan, les forces américaines et européennes pourraient quitter le pays dans les trois à cinq prochaines années tandis qu’en termes d’effectifs, la présence américaine serait réduite de moitié dans les prochains mois, passant donc d’environ 14000 hommes à environ 7000. Dans l’intervalle, un changement majeur dans la répartition des missions serait opéré puisque les Etats-Unis se concentreraient sur des opérations de contre-terrorisme (frappes aériennes et raids de forces spéciales) tandis que les forces européennes (environ 8600 hommes) seraient chargées de poursuivre la mission cruciale de formation des forces de sécurité et de défense afghanes.
Ce plan, dans ses grandes lignes, recueillerait l’assentiment de Washington et de l’Etat-Major de l’Otan. Pour autant, il demeure à l’état de simple scénario et pourrait être amendé à tout moment par le président Trump en fonction de l’évolution de la situation sur le terrain, aucune décision n’ayant encore été prise alors que les négociations sont appelées à se poursuivre.
Un tel plan soulève néanmoins de nombreuses difficultés. La première est l’opposition totale de la direction des Talibans au maintien des forces occidentales en Afghanistan pour les cinq prochaines années.
Par ailleurs, ce plan soulève une certaine inquiétude des alliés européens présents sur le théâtre afghan, qui sont fortement tributaires des forces américaines en termes de logistique, de transport et d’évacuation sanitaire notamment. Plusieurs Etats européens ont d’emblée fait savoir qu’ils retireraient leurs forces si le soutien américain devenait trop ténu.
Enfin, le recentrage américain sur des missions de contre-terrorisme réduirait fortement les effectifs affectés à la formation des forces afghanes. Or, une telle dynamique risquerait de rendre ces dernières non seulement encore plus vulnérables aux attaques mais susciterait même un risque de dislocation. En effet, si des progrès manifestes ont été réalisés par l’armée afghane, et malgré l’investissement massif de Washington en la matière (notamment en vue de reconstituer une force aérienne afghane), les forces afghanes demeurent encore très fragiles. Il est ainsi estimé que l’armée de l’air afghane ne pourrait être autonome qu’à compter d’environ 2030.
En outre, l’historique récent du bilan des forces étrangères formées par les Etats-Unis après le retrait de ces derniers est assez éloquent : les forces du Sud-Viêtnam avaient tenu deux ans après le retrait américain en 1973 tandis qu’une large fraction de l’armée irakienne s’est effondrée devant l’offensive de Daech en 2014.
A ce stade, ce plan demeure donc un simple scénario qui devrait être utilisé comme levier par Zalmay Khalilzad au cours du prochain cycle de négociations avec les Talibans. Il convient donc de demeure très prudent dans l’évaluation des perspectives d’évolution du dispositif américain et allié sur le théâtre afghan. Les prochaines négociations bilatérales n’en seront que plus déterminantes.