Par Fanny Hantute
Si le deuxième sommet entre les dirigeants Américains et Nord-Coréens se clôt tout sourire, il n’aura duré que 45 minutes sans s’achever par la signature d’un accord de dénucléarisation.
Pyongyang aurait été prêt à procéder au démantèlement “complet et permanent” de son arsenal nucléaire dans la région de Yongbyon et à l’arrêt des essais nucléaires et de missiles balistiques intercontinentaux, précise dans une conférence de presse le Ministre des Affaires Étrangères Nord-Coréen, Ri Yong Ho [1]. À en croire les déclarations du Président des Etats-Unis, cette dernière proposition ne suffisait pas à autoriser la levée des sanctions économiques imposées par les Nations Unies depuis mars 2016 et demandée par Kim Jong-un en contrepartie [2]. Anthony Khun, correspondant du réseau de radiodiffusion Américain NPR en Chine, explique que les Etats-Unis attendaient qu’un “pas supplémentaire” soit fait par la Corée du Nord “s’agissant de leur programme secret d’enrichissement en uranium de 2002” [3].
“Aucun accord est mieux qu’un mauvais accord” affirme Donald Trump ; le Premier Ministre Japonais soutient cette décision. Pour Shinzo Abe, la sécurité de la région est garantie si toutes les installations nucléaires existantes sont démantelées, dont celle de Nodong menaçant la sécurité nationale du Japon [4]. La réaction de la Chine et de la Corée du Sud est plus mesurée, à en croire le journal libéral chinois South China Morning Post [5]. L’absence d’accord remet en cause la stratégie du Président de la République de Corée, explique Antoine Bonda, chercheur spécialiste de l’Asie et du Pacifique; Moon Jae-in souhaitant instituer un rapprochement économique avec le Nord dans la perspective de rétablir la stabilité géopolitique de la péninsule, ce qu’il ne peut faire sans la levée des sanctions [6].
Ce rapprochement est soutenu par les États-Unis et pourrait mettre fin à la guerre de Corée de 1953 note le journal de centre-gauche The Washington Post. Afin de se positionner comme un intermédiaire, le Président Américain doit néanmoins gagner la confiance de Kim Jong-un, explique Antoine Bonda. Une partie de la confiance ne pourrait-elle pas s’appuyer sur “la rencontre bilatérale Trump-Kim Jong-un [qui] est pour ce dernier, un immense succès diplomatique”, selon Laurence Nardon, responsable du programme Amérique du Nord de l’IFRI [6]. Pour Ian Bremmer, politologue américain spécialisé en politique étrangère américaine, c’est le cas. “Le fait que Trump ne perçoive pas la stratégie Américaine comme un “cadeau” [fait à Kim Jong-un, qu’il rencontre sans avoir obtenu de concession préalable] lui donne beaucoup plus d’espace pour parvenir à une percée légitime” [7].
Sources:
[1]: Amy Held (28 février 2019), “In Rare News Conference, North Korea Offers Its Own Version Of Summit Collapse”, National Public Radio https://www.npr.org/2019/02/28/699006894/in-rare-news-conference-north-korea-offers-its-own-version-of-summit-collapse?t=1551510020249
[2]: Conférence de presse de Donald Trump suivant le Sommet de Hanoi (28 février 2019), ABC News
https://www.youtube.com/watch?v=su3mi77IZ2w
[3]: Anthony Kuhn (28 février 2019), “Why Talks Between The U.S. And North Korea Abruptly Ended”, National Public Radio
https://www.npr.org/2019/02/28/699118983/why-talks-between-the-u-s-and-north-korea-abruptly-ended
[4]: Reiji Yoshida (1 mars 2019), “For Japan, ‘no deal’ at Kim-Trump summit beats a bad deal with concessions to nuclear North Korea”, Japan Times
[5]: Lee Jeong-ho, Bhavan Jaipragas (1 mars 2019), “Trump-Kim summit 2019: North Korea stages late-night press conference to deny US president’s claims about why summit ended”, South China Morning Post
[6]: “Le sommet Corée du Nord – États-Unis” (28 février 2019), 28 Minutes
https://www.arte.tv/fr/videos/081632-132-A/28-minutes/
[7] Ian Bremmer (1 mars 2019), “The Quick Read on the Trump-Kim Summit in Hanoi”, TIME
http://time.com/5541197/quick-read-bremmer-north-korea-summit/