Jeudi 24 janvier, au terme d’un procès qui s’est déroulé en son absence à Kiev, Viktor Ianoukovitch a été condamné à 13 ans de prison pour haute trahison.
Pour mémoire, l’ex-président ukrainien avait pris la fuite en février 2014 après la répression sanglante des semaines de contestations pro-européennes dans la capitale, provoquées par sa décision de suspendre l’accord d’association entre l’Ukraine et l’Union européenne. Le Parlement le destitue le 22 février. Exfiltré grâce à une opération spéciale orchestrée par Moscou, il s’était réfugié à Rostov-sur-le-Don en Russie. En mai 2014, dans une conférence de presse, il annonce “respecter le choix” du peuple ukrainien qui s’apprête à élire à sa place Petro Porochenko. Il s’agit de sa dernière conférence de presse avant de disparaître du paysage politique. En 2015, Ianoukovitch sort de son silence lors d’une interview accordée à la BBC, regrettant « l’effusion de sang » provoquée par l’intervention brutale des forces de l’ordre contre les manifestants de Maïdan. Il nie par la même occasion avoir ordonné d’ouvrir le feu et déplore l’annexion de la Crimée. Il se présente alors comme victime d’un coup d’État organisé par ses opposants. En janvier 2015, Interpol diffuse un avis de recherche à son encontre, notamment soupçonné de corruption, tandis que l’Ukraine avait demandé à l’organisation de le rechercher pour « abus de pouvoir et meurtres ».
La semaine dernière, à l’issue d’un procès par contumace, l’ex-président ukrainien a été accusé de « haute trahison » en Ukraine, notamment pour avoir demandé à Vladimir Poutine d’envoyer des troupes russes en Ukraine après sa fuite en Russie. L’accusation se basait principalement sur une « adresse » envoyée à Vladimir Poutine le 1er mars 2014 dans laquelle Viktor Ianoukovitch, quelques jours après sa destitution, demandait « l’utilisation des forces armées de la Fédération de Russie (…) dans le but de rétablir l’ordre constitutionnel et la stabilité ainsi que de défendre la population ukrainienne ». Moscou a nié avoir reçu l’adresse en question. Beaucoup d’Ukrainiens souhaitaient cependant que l’ancien président soit jugé, notamment pour la répression sanglante des contestations entraînant la mort de centaines de manifestants de Maïdan. Pour d’autres, les années Ianoukovitch restent associées à la prédation économique organisée au sommet de l’Etat ainsi qu’à la corruption endémique. Malgré tout, comme l’affirme Daria Kaleniouk de l’ONG Centre d’action contre la corruption, il est difficile d’ouvrir des dossiers de corruption sur Viktor Ianoukovitch car cela impliquerait des personnalités devenues soutien du pouvoir actuel en Ukraine.
Ce procès est dénoncé comme une farce par beaucoup d’Ukrainiens, qui n’y voient qu’un symbole. Viktor Ianoukovitch, qui ne purgera jamais sa peine, avait même refusé les dernières convocations par vidéo-conférence du tribunal.