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Russie/Etats-Unis: Proposition d’élargissement du Traité FNI aux Etats du seuil par la Russie
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Russie/Etats-Unis: Proposition d’élargissement du Traité FNI aux Etats du seuil par la Russie

 

Suite aux soupçons américains d’une violation par Moscou du traité sur les Forces Nucléaires de Portée Intermédiaire (FNI) en 2014, à travers le développement du missile Novator 9M729 ou SSC-8 code OTAN, les Etats Unis ont menacé le 20 Octobre 2018 de se retirer du traité, sans toutefois donner de précision calendaire. En conséquence, l’OTAN et l’Union Européenne ont lancé un ultimatum à la Russie début décembre: elle dispose de soixante jours pour clarifier sa position concernant son engagement. Moscou déclare ne pas avoir violé le traité: puisque le missile 9M729 a une portée de 500 km, il ne serait donc pas soumis aux dispositions du traité. Elle déclare  avoir également soumis le matériel aux procédures de contrôle américaines.

 

Signé en 1987 entre les deux grandes puissances, le traité FNI avait permis de mettre fin à la crise des euromissiles en Europe, en prohibant l’acquisition de forces nucléaires intermédiaires, c’est à dire de missiles sol-sol possédant une portée comprise entre 500 et 5.500 km. Ces catégories de missiles peuvent emporter une charge conventionnelle et une charge nucléaire. Hérité de la guerre froide un retrait américain priverait ce traité bilatéral de sa viabilité, et porterait un coup supplémentaire à une coopération russo-américaine pourtant pilote sur la question du désarmement. En ce sens, le retrait américain apparaîtrait comme un non sens stratégique.

 

Par ailleurs, il semble très peu probable qu’une puissance telle que la Russie se soumette à un ultimatum. Ceci induirait un risque réputationnel pour Moscou. Enfin, selon Vladimir Poutine, le retrait américain auquel la Russie est fermement opposée, signerait la reprise de la course aux armements et constituerait une immense menace pour  la sécurité internationale.

 

Mais, indépendamment des accusations réciproques, la volonté du retrait trouve une grande partie de sa justification dans la menace que fait peser la Chine sur le processus de désarmement. Elle augmente ses capacités stratégiques de façon considérable, suscitant l’inquiétude de Washington sur la question des forces nucléaires intermédiaires. John Bolton considère le FNI comme «un traité bilatéral dans un monde multipolaire.», ce qui illustre le caractère inadapté du traité aux enjeux de sécurité du XXIème siècle. La Chine disposerait d’environ 1000 à 2000 missiles dont 80% seraient interdits par le FNI.

 

Ainsi, la situation actuelle laisse à des États non signataires – donc non contraints- la possibilité de développer des programmes d’acquisition qui fragilisent toute l’architecture de sécurité concernant les forces non conventionnelles d’une part. Ces Etats pourraient d’autre part bénéficier à terme d’une supériorité technologique sur les États Unis alors que ceux-ci continuent de respecter leurs engagements dans le cadre du Traité. Ainsi, Moscou, qui partage les mêmes inquiétudes que Washington, a exprimé l’hypothèse d’élargir le Traité FNI à des Etats du seuil, tels que l’Inde et la Chine, afin d’enrayer le processus de supériorité technologique et d’assurer la pérennité de la maîtrise des armements. C’est aussi un moyen de maintenir le dialogue avec Washington. La Chine, pour l’heure ne semble pas disposée à accepter de se soumettre au Traité FNI. Ainsi, un retrait américain reposerait plus sur le maintien de sa supériorité militaire sur la Chine que  sur la violation du traité FNI par la Fédération de Russie.

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