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Centrafrique : guerre d’influence entre la France et la Russie
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Par Edouard Josse

 

 

Le 20 novembre dernier s’est tenue à New York une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies, convoqué par la Chine qui le préside ce mois-ci. Cette réunion, sous la forme d’un débat public, était consacrée à la paix, à la sécurité et au renforcement des opérations de maintien de la paix en Afrique. À cette occasion, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a insisté sur l’importance du partenariat entre l’ONU et l’Union africaine et des contributions des États membres africains aux efforts collectifs pour la paix. Cette réunion a encore une fois conduit à un échec des négociations entre la France, la Russie et les États-Unis sur la question centrafricaine.

 

Cette nouvelle réunion faisait suite à celle du 15 novembre dernier sur un thème strictement identique ; le Conseil y avait été contraint de renouveler uniquement pour un mois le mandat de la mission de maintien de la paix en République centrafricaine (MINUSCA). Ce renouvellement technique jusqu’au 15 décembre ne réglait rien sur le fond. En cause, le projet de résolution présenté par la France qui prévoyait que les casques bleus de la MINUSCA encadrent le redéploiement des forces armées centrafricaines (FACA) formées par la mission européenne de formation (EUTM RCA). Les États-Unis ont fait savoir qu’ils refuseraient de voter une résolution impliquant une augmentation du budget de la MINUSCA et n’ont donné qu’un accord de principe. La France avait en effet assuré que cette nouvelle mission d’encadrement dévolue à la MINUSCA n’impliquerait pas de hausse budgétaire. Les États-Unis ont tout de même demandé un délai supplémentaire, faisant valoir la nécessité d’un vote préalable du Congrès.

 

Le projet de résolution s’était de toute façon heurté au véto de la Russie : celle-ci réclame que la MINUSCA encadre aussi le redéploiement des soldats centrafricains que la Russie a formés, et exige surtout que le texte proposé par la France reconnaisse son implication pour la paix dans le pays. Le projet de résolution français ne faisait en effet référence qu’au rôle de l’Union africaine dans le processus politique en RCA.

 

Depuis plusieurs mois, la Russie, qui a considérablement accru sa présence dans le pays au travers de sociétés militaires privées, agace fortement la France. Outre ses activités de formation au profit des FACA et ses prestations de protection rapprochée pour le président Faustin-Archange Touadéra, la Russie mène des négociations avec les factions armées en dehors du processus de médiation conduit par l’Union africaine.

 

Depuis la fin de l’été, le Quai d’Orsay et Balard ont clairement haussé le ton et accusent insidieusement Moscou de poursuivre des « ambitions voilées ». Le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian avait d’abord prévenu que la Centrafrique n’est pas un « terrain de jeu », et que « ceux qui ont d’autres pensées, ceux qui ont d’autres agendas [que la sécurité et le développement] devront en faire les frais ». Plus tard, la ministre des Armées Florence Parly appelait au respect de l’Union africaine et déclarait : « toutes les autres initiatives qui sont des initiatives opportunistes et souvent intéressées ne me paraissent pas contribuer à résoudre de façon positive la situation sécuritaire dans ce pays ». La France n’accuse donc pas seulement Moscou d’initiatives diplomatiques malheureuses et contreproductives sapant l’autorité de l’Union africaine, elle sous-entend fortement que la Russie vise l’exploitation des ressources minières du pays.

 

Lors de la dernière séance du 20 novembre, aucun nouveau projet de résolution n’a pu être présenté devant le Conseil. La France et la Russie ont seulement déclaré ne pas être opposées à un autre projet de résolution, qui sera présenté dans les prochaines semaines, et permettrait que le Conseil consente, au cas par cas, à financer des opérations de maintien de la paix décidées ou mandatées par l’Union africaine. Quoiqu’il en soit, pour ce qui concerne le mandat de la MINUSCA, la perspective d’une nouvelle prolongation technique d’un mois au-delà du 15 décembre apparaît aujourd’hui possible.

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