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Rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine : au-delà du tollé, quelles perspectives militaires ?
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Rencontre entre Donald Trump et Vladimir Poutine : au-delà du tollé, quelles perspectives militaires ?

Par Xavier Marié

 

 

Autant le récent sommet de l’OTAN s’était révélé houleux du fait des prises de position virulentes du président Trump, autant sa rencontre bilatérale à huis clos avec son homologue russe Vladimir Poutine à Helsinki semble lui avoir procuré entière satisfaction. Même s’il est encore trop tôt pour fournir une analyse d’ensemble de ce nouveau développement, quelques pistes peuvent être esquissées.

 

Cette rencontre entre les Présidents américain et russe suscite, à juste titre, de nombreux questionnements, tant au sein même de la classe politique américaine qu’à travers les chancelleries européennes. D’une durée de deux heures, elle s’est tenue à huis clos avec pour seuls témoins les interprètes respectifs des deux dirigeants. Par conséquent, la teneur exacte des discussions et les éventuels engagements pris de part et d’autre demeurent inconnus. Si la Maison-Blanche assure qu’aucun enregistrement de la discussion n’existait, le Directeur du renseignement national Dan Coats, a précisé ne pas pouvoir exclure la possibilité que les services russes aient enregistré la rencontre, soulignant également n’avoir pas été informé des propos qui avaient été échangés.

 

De fait, même les plus proches collaborateurs du Président américain ne semblent pas avoir été informés de la teneur exacte de l’échange. À l’issue de la rencontre, Mike Pompeo, John Bolton et John Kelly, qui accompagnaient le Président, se seraient vus remettre un compte-rendu succinct de la discussion tandis que le Président a, si l’on s’en tient à son emploi du temps, rencontré à huis clos le Secrétaire d’Etat Mike Pompeo puis le Secrétaire à la Défense James Mattis. Il est assez vraisemblable qu’ils soient les deux membres de l’administration à avoir eu accès à des détails sur la teneur de la rencontre. En effet, un aide de la Maison-Blanche a déclaré qu’au moins deux hauts responsables de l’administration Trump avaient été informés en détail du contenu de la rencontre, mais il s’est refusé à les identifier.

 

De son côté, Heather Nauert, porte-parole du Département d’Etat, a rejeté le terme « d’accords » ou « d’engagements verbaux », estimant que trois « modestes » conclusions tirées de la rencontre étaient en cours d’examen : la constitution d’un groupe de travail de haut niveau dans le domaine économique, avec des dirigeants d’entreprise des deux pays ; la création d’un conseil d’experts comportant d’anciens diplomates et militaires des deux Etats ; la tenue de réunions entre les conseils de sécurité nationale respectifs afin de poursuivre la dynamique impulsée par la rencontre.

 

Vient ensuite la question des déclarations officielles qui ont suivi la rencontre. Le président Trump a immédiatement fait part de sa satisfaction à l’issue de la réunion qu’il a qualifiée de « grand succès ». Interrogé sur une potentielle ingérence russe dans l’élection présidentielle de 2016, Donald Trump a d’abord refusé de soutenir les conclusions des services de renseignement américains, se déclarant convaincus par les dénégations du président Poutine quant à une potentielle implication de la Russie. Puis, devant le tollé transpartisan suscité par ses propos aux Etats-Unis, et notamment au sein du parti républicain, le président Trump a effectué un de ces revirements complets dont il est coutumier.

 

Ce nouveau développement de la politique étrangère américaine semble avoir déclenché une vague d’inquiétude particulièrement forte aux Etats-Unis, se traduisant par la montée aux créneaux d’une large partie de la classe politique américaine et de la sphère de défense, de sécurité et diplomatique (avec notamment la demande d’une audition de Marina Gross, l’interprète du président Trump durant la rencontre, dont les notes constituent la seule retranscription des propos tenus).

 

Au plan militaire, il est très significatif de noter la discrétion du Pentagone et du Secrétaire à la Défense depuis la rencontre alors que de nombreux thèmes sensibles ont très vraisemblablement été évoqués par les deux présidents (selon les tweets présidentiels : contre-terrorisme, Syrie, Ukraine, Corée du Nord, prolifération nucléaire, cyber, etc.). Sur le dossier syrien, le général Votel, commandant le Central Command, a déclaré n’avoir pas reçu de directives spécifiques et a précisé que toute composante militaire d’un éventuel accord américano-russe sur la Syrie serait vraisemblablement soumise à une autorisation du Congrès, et ce alors que les forces américaines sur le terrain travaillent à coordonner leur action avec les forces russes afin d’éviter tout incident qui pourrait être lourd de conséquences.

 

Se pose également la question, centrale, de la nature de la relation du président américain envers ses alliés de l’OTAN et de sa détermination à mettre en œuvre le principe de défense collective établi par l’article 5 du traité de l’Atlantique nord. Cette interrogation s’inscrit dans un contexte de relative inquiétude des Etats-membres européens, tout particulièrement au regard du contraste entre l’approche frontale adoptée lors du sommet de l’OTAN et le ton beaucoup plus conciliant adopté à l’égard de Moscou. Les inquiétudes suscitées par les déclarations du président Trump sur l’OTAN ont été avivées par une déclaration ambiguë dans laquelle il souligne le risque qu’un petit Etat, tel que le Monténégro (dernier Etat à avoir rejoint l’OTAN), puisse susciter le déclenchement d’un conflit d’envergure mondiale, laissant planer un doute quant à sa détermination à appliquer la clause de défense collective dans un tel cas de figure.

 

Il convient d’ailleurs de noter que plusieurs sénateurs du très influent Comité sénatorial sur les forces armées (SASC) ont assuré qu’en cas de volonté présidentielle de retrait de l’Otan, le Congrès était en mesure de prévenir une telle issue, en témoigne le résultat du vote sur le soutien du Sénat à l’Otan (97-2). Demeure enfin pendante la question du positionnement de Donald Trump quant à l’annexion de la Crimée par la Russie et son rôle dans la poursuite de la guerre civile dans l’est de l’Ukraine.

 

Cette séquence pourrait bien se poursuivre après l’annonce par le président Trump qu’il avait, par le truchement de son Conseiller à la Sécurité Nationale John Bolton, invité Vladimir Poutine à Washington durant l’automne, renforçant la déferlante de critiques initiée par l’issue de la rencontre bilatérale. Cette deuxième rencontre aurait vocation à élaborer des plans visant à traduire en actes les engagements verbaux que pourraient avoir pris les dirigeants américain et russe. Si elle se concrétisait, cette visite serait la première depuis 2010, date de la venue du président Medvedev, actuel Premier ministre de la Fédération de Russie.

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