Ce vendredi 16 mars, l’ex-lieutenant-colonel Guillaume Ancel publie un ouvrage qui tend à remettre en cause la justification de l’intervention française au Rwanda en 1994 lors du dernier génocide du XXe siècle (800 000 morts en trois mois, en majorité tutsi, que permet le gouvernement à dominante Hutu). Dans « Rwanda, la fin du silence » : un officier français raconte, l’auteur réfute à l’opération « Turquoise » son statut humanitaire, et affirme avoir été déployé pour sauver un régime « ami » pourtant emporté par la folie meurtrière. Alors officier de guidage de tir aérien, il aurait eu pour mission d’effectuer un raid sur Kigali afin de remettre en place le gouvernement Hutu, allié des forces françaises, contre le Front patriotique rwandais (FPR, formé par des exilés tutsis). L’opération aurait finalement été annulée : l’armée française se serait contentée de sécuriser une région non occupée par les Tutsis, qualifiée ensuite de « zone humanitaire ».
Ancel remet ainsi en question la version officielle de cette intervention et s’oppose à la « culture du silence », propre selon lui à l’armée française qui transige vis-à-vis de ses voisins Anglo-Saxons. Ce témoignage, bien que non consensuel, s’inscrit dans une réflexion plus large sur le rôle de la France au Rwanda et l’accès à la totalité des archives disponibles sur ce sujet. Dans une série d’enquêtes publiée cette semaine dans Le Monde, on apprend que le Service historique de la défense dispose à lui seul de 210 cartons d’archives « provenant de plus de quarante services ou unités différents » qui permettrait de révéler le rôle et les objectifs de l’armée française dans ce conflit. Cependant, l’accès à ces documents reste, 25 ans après les évènements, semé d’embûches, alors que la plupart des acteurs souhaitent leur ouverture.