Now Reading:
Démission du président Nursultan Nazarbayev au Kazakhstan
Full Article 3 minutes read

Par Suzanne Kaltenbach

 

Le 19 mars, dans une allocution préenregistrée retransmise à la télévision, le président Nursultan Nazarbayev, au pouvoir depuis près de trente ans, a annoncé son retrait de la présidence du Kazakhstan. Il a indiqué souhaiter favoriser l’accession au pouvoir d’une nouvelle génération qui prolongerait les réformes engagées (privatisation, diversification de l’économie). Conformément à la Constitution, le président du Sénat, Kassymzhomart Tokayeev doit lui succéder jusqu’aux prochaines présidentielles, prévues en 2020.

 

L’annonce de son retrait intervient moins d’un mois après le brusque limogeage de son gouvernement et de son premier ministre, qui lui reprochaient de mauvais résultats économiques. Il avait justifié cette décision par l’insuffisance des résultats en matière de développement et avait promis de prendre des mesures sociales pour répondre au mécontentement croissant de la population face à la stagnation du niveau de vie.

 

A la tête du pays depuis 1989, alors que le Kazakhstan était encore une république soviétique, Nazarbayev a conservé le pouvoir au moment de l’indépendance avant d’être réélu à maintes reprises lors d’élections taillées sur mesure. En avril 2015, il avait été reconduit dans son mandat présidentiel en obtenant plus de 97 % des suffrages. Il bénéficie non seulement d’une popularité basée sur le gage de stabilité qu’il représente mais aussi d’un statut officiel de « père de la nation », qui lui garantit par ailleurs l’immunité judiciaire et un rôle influent.

 

Ainsi, malgré sa démission, N. Nazarbayev ne devrait pas disparaître pour autant de la vie politique kazakhe. Il reste membre du Conseil constitutionnel et président du parti au pouvoir Nur Otan. Il reste également à la tête du Conseil de sécurité du pays, et partant en charge des forces de l’ordre. Enfin, grâce à des mesures qu’il avait prises lors de sa présidence, il peut jouir du statut particulier de « Premier président » de la nation.

 

La société civile et la sphère journaliste ont été prises de court par cette décision et peinent encore à voir clair dans les intentions du président. Selon certains observateurs, N. Nazarbayev continuera à gouverner le pays mais avec un titre différent comme l’indique l’analyste indépendant Sergueï Douvanov qui affirme que si l’ex-président “aura tous les pouvoirs […], cet agenda présidentiel chargé avec réunion gouvernementales, visites diplomatiques et cérémonies […] sera pour quelqu’un d’autre.” Pour certains commentateurs politiques, l’ancien président commence à préparer sa succession au profit de sa fille, Dagira, qui sera vraisemblablement candidate aux prochaines présidentielles.

 

L’enjeu de la succession est de taille car la présence de N. Nazarbaïev, créateur et le garant de la souveraineté kazakh, au prix d’une pratique autoritaire du pouvoir et d’une corruption endémique représentait un gage de stabilité dans le pays. La stabilité du Kazakhstan importe d’autant plus à l’international que ce pays dispose de réserves parmi les plus importantes du monde en chrome, fer, manganèse, zinc, cobalt, charbon et  uranium, dont il est le premier producteur de la planète. Il est aussi dixième exportateur mondial de pétrole. Depuis la fin de l’URSS, le Kazakhstan mène aussi une stratégie d’alliance équilibrée entre la Russie et les pays occidentaux.

 

Input your search keywords and press Enter.