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Vers une réduction de la présence militaire américaine en Afrique ?
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Par Xavier Marié

 

 

Dans le sillage de l’embuscade meurtrière d’octobre 2017 au Niger, le général Thomas D. Waldhauser, en charge de l’Africa Command, a annoncé une série de mesures visant à accroître la sécurité des forces déployées sur le continent, parmi lesquelles l’emploi de drones armés et de véhicules blindés, ainsi qu’une réduction du délai d’évacuation médicale (Medevac). Un rapport synthétisant les dispositions à prendre devrait être rendu mi-août.

 

Mais au-delà de ces aspects tactiques, le New York Times rapporte un entretien avec le général Waldhauser qui, tout en prenant soin de préciser que les Etats-Unis ne quittent pas le continent pour autant, annonce une réduction significative du dispositif américain en Afrique, jusqu’ici principalement dédié à la formation et à l’appui des forces locales afin de permettre l’autonomisation des États locaux dans la lutte contre les groupes armées terroristes.

 

Concrètement, ce retrait partiel mais conséquent devrait se traduire par la réaffectation de plusieurs centaines d’opérateurs des forces spéciales parmi les 1200 qui sont actuellement déployés en Afrique centrale et occidentale (environ 6000 soldats américains sont présents à travers 53 pays africains). Il devrait commencer par le Cameroun, où environ 300 soldats américains remplissent des missions de formation des forces spéciales nationales. Le général Waldhauser estime que ces efforts de formation ont porté leurs fruits et que les forces locales n’ont désormais plus besoin de soutien américain dans la conduite de leurs missions. Au total, près d’un quart des effectifs pourraient être réaffectés durant les 18 prochains mois, allant jusqu’à la moitié sur trois ans. Il convient de noter, que, nonobstant l’ampleur de ces coupes, le dispositif américain sur le continent impliquerait environ 700 personnels des forces spéciales, soit dix fois plus qu’en 2006. En outre, les réductions d’effectifs pourraient être moindres pour les opérateurs des forces spéciales de l’US Army, dits “Bérets verts”, qui avaient payé le prix du sang lors de l’embuscade d’octobre 2017.

 

Enfin, est évoquée la possibilité que des forces conventionnelles prennent le relais des forces spéciales pour assurer certaines de leurs missions.

 

Cette évolution notable est étayée par deux grandes justifications. Premièrement, elle s’inscrit dans le cadre de la nouvelle stratégie de défense américaine, dévoilée en janvier, qui inscrit un virage stratégique majeur, faisant des rivalités interétatiques la priorité pour les forces américaines, devant la lutte antiterroriste qui tenait jusqu’ici le haut du pavé. Deuxièmement, même si cet argument est moins directement avancé, la menace posée par les groupes armés terroristes en Afrique tend à n’être pas perçue comme une menace directe pour le territoire national, rendant peu justifiable aux yeux de l’administration la mise en péril de personnels militaires américains.

 

Plusieurs experts soulignent que la présence et l’engagement militaire américains en Afrique sont déjà modestes en comparaison des autres grands théâtres d’opérations (Moyen-Orient/Afpak ; Asie ; Europe), ainsi que l’arrivée sur le continent de la rivalité interétatiques, en témoignent les tensions avec la Chine autour de Djibouti. Enfin, il convient d’interroger la réalité des capacités opérationnelles des forces africaines formées par les soldats américains. Si une montée en puissance est indéniable, leur autonomisation semble loin d’être effective.

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